dimanche 27 novembre 2011

CE QUE VOUS NE LIREZ PAS



Ce qu'en dit Mélanie Collado dans Canadian Literature :



Dans Ce que vous ne lirez pas de Nadine Ltaif, le voyage dans l’espace est indissociable du voyage dans le temps. Les lieux ne sont évoqués que dans leur rapport avec l’histoire ou l’attente. Que ce soit en Espagne, en Inde ou au Liban, les pierres des villes visitées sont imprégnées du passé. Elles gardent les traces des luttes et des fusions entre civilisations et elles témoignent du lourd héritage des haines raciales. Dans les poèmes de ce recueil, le souvenir des guerres l’emporte systématiquement sur la beauté des paysages et des structures. Quant à l’écriture, elle est perçue comme un voyage immobile. Autre trace visible, bien qu’elle soit plus fragile, l’écriture est associée à l’attente, au présent et à Montréal. La poésie permet d’exprimer la perte et la souffrance d’un être écartelé entre l’Orient et l’Occident, entre le passé et le présent. Écrire, c’est un moyen de lutter contre le déséquilibre et de peindre le réel aussi bien que l’imaginaire. Écrire, c’est également pour l’auteure, l’occasion de s’adresser une dernière fois à une poétesse disparue. Monique Bosco ne lira pas le livre de Ltaif, mais cette dernière peut quand même lui rendre hommage en revendiquant son influence. Continuer à écrire c’est continuer à avancer sur le chemin vers lequel Bosco l’a guidée et c’est perpétuer son souvenir, aussi douloureux soit-il.




Nadine Ltaif , Ce que vous ne lirez pas, Éditions du Noroît, 2010. 

Amazon.ca


Autres critiques :

Hugues Corriveau (11 sept, 2010) : http://www.ledevoir.com/culture/livres/295948/poesie-le-monde-qui-se-perpetue



CE QUE VOUS NE LIREZ PAS DE NADINE LTAIF
Par Hejer Charf
Ce que vous ne lirez pas ( Le Noroît, avril 2010) est le sixième recueil de Nadine Ltaif, poétesse québécoise d’origine libanaise.
D’emblée je confesse que je suis juge et partie; l’auteure est mon amie et ma collègue. Elle demeure pourtant, une poétesse à part entière.
Son œuvre est appréciée et étudiée dans plusieurs universités au Canada et à travers le monde. Elle a fait l’objet d’un mémoire de maîtrise à Calgary. Nadine Ltaif figure dans l’Anthologie- La poésie québécoise contemporaine de Jean Royer, (1987).
Son livre « Entre les fleuves » (Montréal, Guernica, 1991), finaliste au Prix Émile Nelligan, est traduit en anglais par Christine Tipper (Changing Shores, Toronto, Guernica, 2008). Il est réédité, ainsi que « Les Métamorphoses d’Ishtar », aux éditions du Noroît, (2008).
Il est vrai que la poésie ne fait pas la une des médias. Je me demande toutefois, pourquoi aucun journal au Québec ne mentionne ou ne rend compte des livres de Nadine Ltaif. Je ne sais pas et je ne m’y attarderai pas.
Ce que vous ne lirez pas est dédié à l’écrivaine québécoise décédée, Monique Bosco, qui a initié, poussé la poétesse à l’écriture.
« Aujourd’hui chère madame
vous auriez fêté vos quatre-vingts ans
il est 8h du matin
sur le toit un vent chaud
prépare une douce journée.
on annonce 30 degrés
vous n’auriez pas aimé
cette journée »
L’écriture de Nadine Ltaif emprunte souvent à la mythologie et aux contes. Elle parle d’identité éclatée, de la difficulté d’être femme en Orient, d’exil et de liberté. Une écriture qui avance dans la contemplation de la nature, le questionnement et l’amour grandissant du pays d’accueil. Une écriture d’une poétesse arabe qui a germé grâce à une professeure attentionnée d’origine juive. Ne serait-ce pas cela la création? Un pied de nez aux races et aux frontières. Un regard ouvert sur l’autre et une interrogation permanente de soi. Ne serait-ce pas cela le Québec? Une terre enrichie de voix plurielles qui l’aiment à l’unisson.
« Vous êtes partie
et les guerres continuent
les questions restent
et me restent entre
les mains. »
Ce que vous ne lirez pas parcourt différents temps et espaces. Il relate les cultures et les pays visités par la poétesse qui plonge dans le passé et l’Histoire pour écrire le présent et lui rappeler sa mémoire douloureuse, souvent sanguinaire. Le verbe reste cependant simple, concis et proche du Haïku.
« Le train quitte
Séville sur des siècles
inassouvis de vengeances
Le retour sur le passé
est terminé à présent
Le présent sera une suite
de petites violences
et de grandes douleurs »
Les mots de Nadine Ltaif puisent dans notre vie de tous les jours. Mais le souvenir n’est jamais très loin. Des mots du quotidien qui explorent le temps et l’être et qui transcendent la réalité pour devenir poésie. Un souffle emprunt d’existentialisme.
« Le temps m’a dit:
tu cherches à savoir qui
je suis
je suis le moment où
tu décides de chercher
les pistaches et les grains
libanais dans les bols
pour les manger. »
Nadine Ltaif lira ses poèmes, le dimanche 16 mai, à 15h, à la librairie Olivieri, Côte-des-Neiges.
Hejer Charf
Publié en mai 2010.

Hejer Charf : http://www.tolerance.ca/Article.aspx?ID=82743&L=fr


dimanche 13 novembre 2011

RENCONTRE AVEC LA CINÉASTE HEJER CHARF



photos des rencontres 
http://www.hejercharf.com/Nadja_productions/Photos_rencontre.html


Programme des projections

Première partie : "Mémoire et effacement de l’histoire"

- Je suis le Futur de votre Mémoire (4 min)


- Un Seul Dieu (3 min)


- Sur la trace de ma malédiction (11 septembre) (13 min) Film d’ouverture du Festival des femmes de Florence 2008

Discussion entre Maïr et Hejer et questions du public

Deuxième partie : "Le vécu des femmes"

- Femmes lapidées (4 min)
(sélectionné dans Women Voice Now 2010) 


- Where Have All The Flowers Gone (22 min)
Festival International du film de New York (édition Los Angeles 2010) en primeur à Montréal

Discussion entre Maïr et Hejer et questions du public


ENTRÉE LIBRE

Le Cénacle-culturel Liban-Québec présente, Films et conscience sociale: que peut le cinéma?, une projection de courts-métrages de la cinéaste tunisienne-québécoise Hejer Charf suivie d’une rencontre avec la réalisatrice qui nous parlera du rôle du cinéma dans notre société. Auteur de plusieurs courts-métrages primés et d'un long métrage documentaire, Les PasseursHejer Charf sonde le réel dans son rapport à la culture et au politique. Ses films poignants frappent par leurs propos et déconstruisent les rapports douloureux qu'entretiennent la tradition et la modernité.
Les rencontres seront animées par Maïr Verthuy, Professeure émérite à l’Université Concordia.


le 20 novembre 2011 à 15h00 
Maison de la culture Ahuntsic-Cartierville,        10300, rue Lajeunesse, 

le 27 novembre 2011 à 14h00 
Maison de la culture du Plateau--Mont-Royal,      465, avenue du Mont-Royal Est, 

mardi 1 novembre 2011

Hanan el-Cheikh : écrire l’histoire de sa mère



Toute une histoire, traduit de l’arabe par Stéphanie Dujols, Actes Sud, 2010

Il y a des sujets sacrés, tabous, qu’un écrivain n’ose toucher que du bout des doigts par peur de leur porter malheur, s’il écrit leur vie. La mère, le père, le frère, la sœur, ou tout membre de sa famille. C’est une superstition. Une croyance stupide mais qui hante l’écrivain. 


Il a fallu du courage et des années pour que Hanan el- Cheikh dévoile une histoire, qui est en quelque sorte son histoire intime. Toute une histoire, c’est la voix de la mère de Hanan qui dicte à sa fille son autobiographie. La valeur historique du récit : le Liban des années trente, quarante, cinquante… soixante ans. L’autobiographique est la chose que l’écrivain a le plus de difficulté à livrer, souvent l’écrivain le censure, ou au mieux, le transpose. Le récit de sa mère devient le roman de Hanan. La version française restitue les savoureux proverbes et dictons populaires de la langue orale arabe : « Comment vais-je nourrir ces deux petits ? En coupant un bout de ma main ?! Comment vais-je les habiller ? En m’arrachant la peau ? » Les titres des chapitres sont autant d’expressions du langage parlé. 


Comme un tiroir qu’on avait laissé fermé dans un coin de sa tête, Kamleh, la mère, le rouvre pour y livrer sa voix qui va s’emparer de l’écriture. On y rit, on y pleure. On ressent la frustration de la mère qui veut apprendre à écrire mais restera analphabète. Hanan fait un précieux cadeau à cette dernière et à nous, qui découvrons l’histoire du Liban. 


L’écrivaine nous avait habitués dans ses romans à dénoncer la condition de la femme arabe. Toute une histoire fait écho à Histoire de Zahra, écrit vingt années plus tôt, il apparaît comme le puzzle manquant à la grande histoire de Hanan el-Cheikh. Kamleh y fait son mea culpa : pour mettre fin à un mariage forcé, elle doit quitter ses enfants pour vivre sa vie de femme libre de choisir l’homme qu’elle aime. Lorsqu’elle se confie à sa fille, la mère dira : « C’est là enfin que les rides du passé ont commencé à s’estomper. » Hanan el-Cheikh s’est souvent appuyée sur des faits de son passé pour établir le cadre de ses romans : Poste restante, Beyrouth s’inspirait de la maison de son enfance au Sud du Liban. 


Soixante-six ans se sont écoulés, Hanan va aller jusqu’à accompagner sa mère dans la maison où sa mère est née. « Une pierre t’emporte, une autre te ramène ». Un récit plein d’humour et de liberté : « Qu’est-ce qu’il fait bon ici… si j’étais restée dans cette maison, je n’aurais jamais pris de Prozac ! ».
Un long voyage nous transporte du Sud du Liban, à Beyrouth, à Ras el-Naquoura, en Syrie, au Koweit et à San Diego. Mère et fille vont se réconcilier dans le rapprochement qui a permis qu’elles se parlent l’une l’autre. Ce livre est le plaidoyer de la mère pour que Hanan lui pardonne son abandon. Hanan écoute et transcrit. On y lit des passages émouvants où la relation mère fille est décrite. Ce récit ne vous fait pas penser au Sido de Colette ? Écrit avec autant de générosité.


Écrire la vie de sa mère apparaît en fin de compte un immense merci et une reconnaissance mutuelle : « L’audace de tes gènes est dans mon sang, tu es la source de ma force et de mon insoumission », écrit Hanan el-Cheikh en terminant cette longue confession.

Chant des créatures de Nadine Ltaif

CHANT DES CRÉATURES, le nouveau recueil de NADINE LTAIF sort en librairie aujourd’hui mardi, le 6 février 2024. « Pour écrire un seul vers, ...